Dans notre société, l’or a deux finalités : la bijouterie et l’épargne. Si la demande d’or pour la bijouterie demeure la principale utilité du métal précieux, la demande d’investissement représente, elle aussi, une part notable du marché.
Chez les ménages, la tradition de l’or se transmet par l’héritage autant que par la volonté de protéger son épargne. Les classes moyennes jouent ainsi un rôle majeur dans l’accumulation d’or, et cette tendance pourrait s’accentuer dans les années à venir.
L’augmentation significative du prix de l’or pourrait entraîner une évolution de l’image de l’or auprès des classes moyennes au même titre qu’un bien « de luxe » ou de « super luxe ».
SOMMAIRE DE L'ARTICLE :
S’il n’existe pas d’estimation véritablement fiable des avoirs détenus par les ménages, il demeure évident que l’or contribue à asseoir une partie de leur épargne.
La demande mondiale en pièces et lingots a progressé d’environ +15 % entre 2014 et 2024, d’après le World Gold Council. Pour autant, cette évolution n’est pas uniforme selon les pays. Sur la même période, la France serait passée d’acheteuse d’environ 1 tonne en 2014 à vendeuse de plus de 2,5 tonnes en 2024.
À l’inverse, la Russie ou encore l’Égypte ont vu leur demande en pièces et lingots quadrupler. La tendance est également à la hausse en Turquie et, plus largement, dans d’autres pays du Moyen-Orient. Au Canada, aux États-Unis ou en Chine, l’augmentation est également perceptible, avec des volumes acquis en progression de 60 % à 70 % sur les 10 dernières années.
Il apparaît donc que les critères d’achat d’or chez les particuliers sont principalement liés :
Tous les pays ne suivent pas la même trajectoire. L’Europe enregistre, dans l’ensemble, un repli de la demande. La Suisse, en particulier, a connu son plus faible niveau d’achats de pièces et lingots sur la période considérée. Une partie de l’explication pourrait tenir aux taux de change.
La chute de l’euro en 2024 a pu contribuer à une hausse implicite du prix de l’or en euros, réduisant la demande des ménages. À l’inverse, la vigueur du dollar a pu favoriser certains achats libellés en devise américaine. Néanmoins, une tendance de fond semble à l’œuvre : malgré la force du franc suisse, la demande domestique y demeure faible, signe d’un phénomène plus structurel qu’un simple effet de change.
De nombreuses études ont mis en avant « que la consommation d’or dans les pays émergents et le revenu disponible entretiennent une relation curvilinéaire : à mesure que les marchés émergents arrivent à maturité et que le panier de consommation des ménages de classe moyenne se diversifie et gagne en sophistication, leur consommation d’or diminue puis se stabilise ».
Les raisons de l’attrait de l’or au sein des classes moyennes sont multiples :
La pierre et l’or demeurent généralement les actifs tangibles privilégiés des ménages. Là où l’immobilier peut générer des loyers, non sans coûts d’entretien, de fiscalité et de vacances, l’or ne produit aucun revenu direct, mais n’occasionne que des coûts limités et maîtrisables, éventuellement liés au stockage.
L’or peut ainsi devenir un actif tangible accessible aux foyers de classe moyenne, sans déstabiliser le budget. La clé réside dans :
Malgré tout, les coûts réels liés aux primes, au stockage, voire aux frais de gestion pour les supports non physiques, doivent être identifiés à l’avance. La conservation exige également un minimum de méthode : coffre, inventaire, factures.
La hausse spectaculaire du cours de l’or ces dernières années réinstalle le métal jaune au rang des biens de prestige. Le fameux Napoléon de 20 francs, qui se négociait une cinquantaine d’euros autour de l’an 2000, dépasse aujourd’hui les 600 €. De même, le lingot d’un kilogramme franchit la barre symbolique des 100 000 €.
Une telle revalorisation peut produire un double effet :
D’une part, un resserrement progressif de la demande de bijouterie, sous l’effet de l’enchérissement de la matière première (« élasticité négative ») ;
D’autre part, une accentuation du prestige de l’or, dont la valeur croissante renforce l’attrait et la charge symbolique aux yeux des ménages.
L’image de l’or pourrait ainsi évoluer dans les prochaines années et gagner en prestige et en attrait.